Millia Luz Collombat
Le rideau se lève au-dessus des planches
Il révèle les coulisses d’une effervescence
Que seuls connaissent
Les vestiaires des spectacles de danse
Sous un éclairage chirurgical, débute
Un ballet lugubre et familier
Les danseuses masquées de tulle
Veillent à ne pas trébucher
Avec ardeur et fébrilité, elles évitent
De transgresser des codes immémoriaux
Fidèles à une loi jamais écrite
Sous peine d’être jetées au cachot
Criminelles pour une heure
Dans leur cellule, enfermées
Leur seule fenêtre est un miroir
Devant lequel elles ne peuvent se défiler
Je la connais, cette ronde infernale
Mes muscles refusent de l’effacer
Dans les cabines d’essayage
C’est nous qui sommes essayées
Nos bouches sont des fermetures éclair
Nos yeux sont des boutons
Nous sommes cousues à même la chair
Pour suivre les lignes du patron
Comme si c’était à nous de nous recoudre
De nous dessiner, de nous ciseler
De nous plier, de nous dissoudre
De nous suspendre, de nous ranger
A nous d’être intemporelles, bien taillées
Pas trop visibles, ni brillantes
Trop criantes, ni risibles,
Surtout pas trop échancrées
Quand les rideaux se ferment et les planches se vident
Tissées de mensonges, des manches jusqu’au col
Nous rangeons nos aiguilles et nos fils
Et finissons froissées au sol
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