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Inflation ou mauvaise gestion?

Gabrielle Bujold-Martineau

Dernière mise à jour : 5 déc. 2024

Gabrielle Bujold-Martineau

Le Café Aquin fait face à des difficultés financières tombant dans des déficits importants comparativement aux autres cafés étudiants autogérés. Le café met la faute sur l’inflation, l’emplacement et la baisse de vie étudiante. Les autres cafés ne semblent pas autant affectés par ces variables.


En allant sur les lieux, plusieurs aspects sautent aux yeux. Les prix sont parmi les plus élevés des cafés étudiants autogérés du campus central. Le Café Aquin n’est pas du tout vide, mais bien occupé. Il est à noter que les étudiant-e-s ont des repas et collations provenant d’ailleurs, dont la cafétéria Hubert-Aquin, ce qui est visible par les emballages ou les plats « Cano ». 


Il n’y a effectivement pas beaucoup d'activité au comptoir de service. Il y a une seule file d'attente avec trois, voire quatre personnes, et ce, lors des périodes achalandées. En arrière, deux ou trois employé-e-s discutent régulièrement, puisqu’ils n'ont effectivement pas beaucoup de clientèle. Anciennement, le café justifiait la présence de trois employé-e-s par la présence du comptoir de sandwich froid fait au café. Ceci n’est plus le cas.


D'autres cafés étudiants autogérés de l'UQAM indiquent fonctionner autrement. « On modifie nos horaires par rapport à l’achalandage, ça ne sert à rien d’être au café quand on ne fait rien derrière le comptoir », explique l’employé A* du café étudiant B. Ce café n’a jamais plus qu’une personne qui travaille, sauf en cas de formation. Et ce, tout comme la majorité des cafés étudiants autogérés du campus central. 


*les personnes des associations et des autres cafés souhaitent l’anonymat « par peur de représailles pour leur honnêteté »


Combien d’employé-e-s de plancher sont nécessaires pour un café dit déficitaire dû au manque de clientèle ?


En remontant le courant et en analysant les budgets et prévisions budgétaires, quelques particularités sont remarquées. Outre une hausse dans les dépenses de nourriture, il y a une montée de dépenses dans les salaires. Il y a une baisse de revenus, malgré une hausse des subventions. 


Ces subventions passent de 7 200$ à 11 000$ par année pour l’AFESPED, puis de 11 250$ à 22 500$ par année pour l’AFESH, et ce, en 4 ans. Sans mentionner que l’AFESH a déjà fait une subvention de 30 000$ sur une seule session. 


Pourtant, tandis que les heures d’ouverture diminuent et la quantité d'employé-e-s aussi, les prix, eux, continuent d’augmenter. Ce sont les dépenses moyennes de payes qui augmentent de 4 500$ à 6 800$ en deux ans. Ce qui dépasse l’inflation.



Désaccord et coquilles relationnelles


Pour éviter la fermeture du Café, les associations se retrouvent donc à faire des chèques et des subventions, ou encore, en cas rare, des prêts. Le café Aquin décrète qu’iels n’ont « pas de problèmes précis avec l’AFESH et/ou l’AFESPED ». 


Le Aquin souligne toutefois une réticence de certains membres lors d’assemblées générales et la remise en question des compétences de gestion du café. Le café dit avoir reçu des « commentaires paternalistes et réducteurs ». Tout en établissant que les membres des associations « comprennent mal les mandats du Café ».


Selon L’AFESPED et l’AFESH, tous deux n’ont aucun enjeu avec le soutien financier du café Aquin. Dans la mesure où ce n’est pas des dits chèques blancs qui payent des salaires. 


En discutant avec plusieurs membres* varié-e-s des associations étudiantes, iels réitèrent être prêt-e-s à financer de l’équipement, comme des machines à café, des divans, ou même une grille pour garder l’espace ouvert plus longtemps. Les membres des associations ont offert de le faire à maintes reprises. Tout comme ils ont offert de multiples solutions au café Aquin. 


Les solutions que le café Aquin emploient semblent être de couper les heures, couper les employé-e-s et augmenter les prix. Le café a créé des prix solidaires. C’est une demande individuelle directe auprès des étudiant-e-s d'aider financièrement le Café en payant 1$ supplémentaire. 


Voici un comparatif de prix du Aquin (A) et du Cafarts (B), le café étudiant des arts et de design:

Café filtre : A) 2,00 et B) 1,75

Cortado : A) 4,25 et B) 3,25

Latte : A) 4,85 et B) 4,00


En plus de catégoriquement refuser les solutions proposées par les associations, le Café Aquin perçoit les associations comme des « bailleurs de fonds ». Un membre C* du café étudiant autogéré D* établit qu' « on leur [les associations] doit de ne pas abuser sur ce qu’on dépense. Chaque dépense, on fait vraiment attention que ça ait du sens ».


Dans leurs fiches budgétaires, un prêt de l’AFESPED de 3 000$ est considéré comme une subvention. Les subventions sont classées dans la section revenus, représentant près du tiers de cette catégorie. Ainsi, les dettes affichées qui en découlent ne reflètent pas leur réalité financière. 


Pour l’année 2023-2024 spécifiquement , un « revenu » total de 213 871,72$ est enregistré, ce qui compte 64 000$ de subventions. Si les subventions n'étaient pas qualifiées de revenus, ceux-ci seraient de 150 871,72$. Le déficit surplus affiché est de 5 764,86$, alors qu’il est concrètement épongé par les subventions. Il revient réellement à 58 235,14$. 


Pour l’année 2024-2025, la fiche de prévision budgétaire du Café prévoit un déficit de 134 691,94 $. Entre autres, les cases de prévision de revenus sont en grande partie vides et leurs prévisions sont incomplètes à d’autres endroits. Il est à noter que les subventions des associations y figurent déjà avant même d’avoir été accordées au café. Il y a également des dépenses élevées et des revenus faibles qui entrent en jeu dans le calcul.



Briser sa propre parole


Le café Aquin dit qu’il a comme mission d'« offrir aux étudiants un service de restauration de qualité, peu coûteux, ainsi qu’un espace de travail inclusif pour les membres des deux associations [l’AFESH et l’AFESPED] ». Ce qui se trouve dans leur charte officielle est « de créer un espace de communauté et offrir de la bonne bouffe et un café à prix abordable ». 


Pourtant, le premier aspect évoqué dans leur charte est mis de côté, du simple fait qu’il n’y a presque plus de divans dans l’espace du café. Les portes ferment après les heures de cours de l'après-midi, soit vers 18h, parfois plus tôt. Historiquement, le café était ouvert et occupé passé 21h.


Le café ferme parfois lors de grèves et leurs heures restent payées. En comparatif, le café D* clarifie que « s’il y a une grève, on va seulement être payé si l’on vient donner du café, des viennoiseries, si on vient aider au mouvement de grève en tant que café étudiant ».


La seule mission qu'ils semblent remplir ne se trouve même pas dans leur charte officielle. Et c’est également sous ce mandat que le café tente de justifier plusieurs critiques.


L’attribuant à leur difficulté financière, le Café Aquin se plaint que certaines heures de rencontre « ne sont pas rémunérées puisque, encore une fois, le Café n’a pas les fonds suffisants pour le faire ». Mais encore, leur charte et d’ancien-ne-s employé-e-s établissent que les heures de rencontre du comité exécutif relèvent du bénévolat. 


Outre les salaires et autres dépenses qui peuvent être coupés, le café possède non seulement encore un permis de comptoir froid, mais c’est dans leur description d’entreprise d'effectuer la « préparation des sandwichs ». Les frais de sandwichs peuvent être diminués davantage s'ils ne sont pas préfaits ailleurs. Le café Aquin ne semble pas remplir leurs obligations et leur mission, ce qui alimente les tensions soulevées par les associations qui y sont affiliées.


L’inflation ne semble pas être l’enjeu primaire auquel le Café fait face, ni un problème avec un impact notable. Et les possibles solutions semblent abondantes. Pourtant, le problème persiste et s'empire.


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